Tsunami

Un nouveau studio centré sur l’animation : rencontre avec Tsunami

3DVF : Dans les différentes séquences animées pour ce projet, laquelle a été la plus délicate pour vous (artistiquement ou techniquement) et pourquoi ?

Léo : Le film impliquant de nombreux contacts entre la marmotte de « Teddy Rinner » et son adversaire judoka a été un véritable défi technique qui ne devait pas détériorer l’aspect artistique !
Il a fallu éviter les pénétrations entre l’enveloppe des poils et les kimonos tous deux prévus comme guides destinés aux simulations fur & cloth.
Une grosse phase de polish a été nécessaire pour limiter la pénibilité à DigitalDistrict Bordeaux.

Aperçu de l’animation seule

Thibaut : Le plus délicat était de respecter la charte graphique d’animation propre aux marmottes: représenter des sportifs humains, mais avec le caractère de l’animal. J’avais tendance à animer mes personnages de manière trop anthropomorphique. Après quelques retours, les marmottes ont retrouvé leurs mimiques de rongeur.

Florian : Le défi a été de conserver une harmonie et une unité dans cette saison des marmottes.
Il fallait doser entre le réalisme VFX et la fantaisie des scripts aux couleurs « cartoon » comme le film d’escrimeuse Laura Flessel.

Anne : J’ajouterais qu’il fallait coller aux comportements des personnalités sportives emblématiques afin de les reconnaître ; comme l’entraîneur Philippe Lucas.

3DVF : Quels livrables avez-vous fournis à Digital District ?

Léo : Nous avons livré des scènes Maya avec les personnages et props aux contrôleurs bakés à Toonkit Studio qui a généré des alembic caches pour DigitalDistrict Bordeaux.
Grâce à notre pipeline, on a pu s’accorder avec Toonkit et DigitalDistrict Bordeaux sur une nomenclature systémique des livrables, pour automatiser les exports et gagner un maximum de temps.

Anne : Les nomenclatures et paramètres des livrables chez Tsunami sont donc adaptables à chaque studio (exports maya baked, abc, fbx…)

Thibaut : Il nous est arrivé de fournir des éléments riggés et animés directement dans la scène d’animation pour éviter des allers-retours à tâtons contreproductifs, je pense notamment aux câbles d’escrime entre autres. C’est ça le « petit plus Tsunami ».

Aperçu d’un « torture test » de marmotte, par Toonkit

3DVF : Revenons sur le studio lui-même. Vous êtes donc 4 actuellement. Seriez-vous en mesure de gérer des projets de plus grande ampleur que les marmottes de France 3 ?

Florian : Bien entendu ! Tsunami est une structure dédiée aux animateurs Keyframe qui seront accueillis et encadrés par ses 4 créateurs pour tout type de projet jusqu’au long métrage.
Nous avons récemment livré un projet avec bien plus de plans et de personnages mais ça fera l’objet d’un prochain article chez 3DVF si vous nous acceptez toujours (rires)

3DVF: Qui dit animation dit évidemment mise en place d’un pipeline. Quels ont été vos choix, et pour quelles raisons ?

Anne : Je laisse la parole à notre NERD Léo (rires)

Leo : J’ai fait le choix d’utiliser Prism comme pipeline VFX et Animation.
C’est un logiciel open source créé par Richard Frangenberg et fonctionnant à l’appel aux dons.
Le gain de temps est énorme par rapport à un pipe dév en interne surtout que le contact est possible avec les dév du soft, qui sont à l’écoute.
Son utilisation et son interface sont simples et instinctives (on reste animateurs, pas dev ^^)

Thibaut : Prism facilite clairement la phase de prod en tant que prestataire !
Même si l’équipe est constituée exclusivement d’animateur(trice)s, le langage python de Prism reste à la portée de Léo, qui peut le façonner et l’optimiser afin d’améliorer notre workflow.
Pour information, Prism s’intègre avec Houdini, Maya, 3ds Max, blender, Nuke, Rv, shotgun, Deadline, Photoshop, Resolve …

Présentation officielle de Prism

3DVF : Plus largement, quels sont vos critères sur les choix logiciels ? Outil 100% axé animation ou solution généraliste, open source ou non, nécessité de compatibilité avec les standards de l’industrie sont autant d’éléments qui peuvent se contredire…

Florian : La philosophie de Tsunami est de livrer une prestation d’animation keyframe en intégrant les pipelines de fabrication des différents studios.
L’axe stratégique est d’abord d’avoir un outil le plus proche et exclusif possible de notre corps de métier d’animateur. Des solutions sont actuellement en développement et nous restons en veille sur ce point.
L’outil « Prism » est l’engrenage permettant d’intégrer au maximum les standards de l’industrie encore utilisés par les collaborateurs en amont comme en aval de notre prestation.
L’export Alembic intégré à Prism raccorde Tsunami aux pipelines industriels en aval.
Néanmoins, il n’existe pas encore de système pour raccorder les rigs issus des industries à un logiciel exclusif à l’animation keyframe. Par conséquent, nous avons choisi de continuer à animer sur Maya et 3dsMax tout en restant attentifs aux explorations open source de Blender.

Léo : Prism est un outil généraliste faisant le lien entre de nombreux logiciels: Houdini, Maya, 3ds max, Blender, Nuke, Fusion, Natron, Photoshop…
Il est capable de gérer le workflow de la préprod à la postprod.
Il convient parfaitement à la branche animation grâce à son interface (interne et externe aux softs !) permettant de visionner les playblasts depuis le « Browser » et même de les intégrer au shotgun client, ce qui offre un gain de temps considérable pour les retours anim.
De plus, il reste modulable, et adaptable puisqu’il est open source. Un contact direct avec le développeur Richard Frangenberg est possible pour toutes questions, soumissions de nouvelles features ou d’idées améliorant l’outil.
Prism est un outil fonctionnant aux dons et pourra convenir au jeunes structures ou indépendants.

3DVF: Quelques mots également sur vos stations de travail ?

Florian : Ecoute, j’ai contacté les copains de Progiss [NDLR : partenaire de 3DVF, revendeur de solutions matérielles, logicielles, formations pour les entreprises du secteur de l’Image] sur qui j’ai historiquement toujours pu compter et ce même à la dernière minute.
Je leur ai dit texto : « Je ne m’y connais pas et ça ne m’intéresse pas mais il nous faut un serveur et des machines avec la puissance pour faire de l’animation keyframe pour du VFX » (rire)
Le gros avantage, c’est que la prestation de Tsunami n’est pas gourmande en qualité d’écran ou en puissance graphique puisque l’on ne gère que le mouvement de l’animation.
Les scènes d’animation sont aussi peu gourmandes en espace serveur.

Autre projet de Tsunami : animation keyframe pour le spot Kinder Natoons.
Production : Venus Productions

3DVF: Le lieu du studio pourra surprendre : Bordeaux et non pas une ville déjà riche en studios comme Paris ou Angoulême. Pourquoi ce choix, et l’écosystème de studios sur place est-il suffisant pour que des artistes (intermittents ou non) puissent trouver des postes s’ils souhaitent changer d’entreprise ?

Florian : Le choix s’est porté sur Bordeaux pour plusieurs raisons :
D’abord, c’est une très belle ville attractive.
Parmi les domaines soutenus, on retrouve l’industrie du Jeu vidéo totalement compatible avec la prestation de Tsunami.
Il est vrai que le secteur de l’animation reste exclusif au Pôle Magélis de la ville d’Angoulême dans la région, ce que je déplore surtout que l’on partage déjà des projets entre entreprises de Nouvelle Aquitaine comme Toonkit Studio à Angoulême ou Digital District à Bordeaux (ex: Les marmottes2020 de France 3)
Cela à part, je voulais éviter les secteurs concentrant déjà de nombreux studios d’animation au risque d’être de nouveau confronté au problème de tension du métier d’animateur Keyframe vécu à Paris.
Je note également une migration considérable de créatifs de Paris vers Bordeaux ce qui présage un chouette tissu créatif à garnir.

Anne : Bordeaux reste à 2 h de Paris et 45 min d’Angoulême en train !!!
Nous espérons que les animateurs de Paris ou ailleurs seront séduits par notre projet.
Il y a quelques écoles d’animation sur Bordeaux et nous souhaiterions offrir les opportunités aux artistes locaux peu séduits par une carrière dans la capitale ou à l’internationale.

Thibaut : L’importance du cadre de vie et de l’environnement de travail est primordial pour l’équilibre et le bien-être de l’équipe. Il peut révéler les capacités productives et créatives. Certains se sentiront mieux à la campagne, d’autres au bord de l’océan…
La crise sanitaire a mis en lumière une certaine volonté de la population à vivre de leur passion en province et donc une nécessité à décentraliser notre métier.

Leo : Puisque tout est dit, j’ajouterais que Paris n’est pas surfable ^^

Animation keyframe pour la marque Cono
Production : Asap Films
Rigging : Toonkit Studios
VFX & post-production : Digital District Bordeaux

3DVF: Le lancement d’une société est toujours une phase délicate : Tsunami a-t-il pu bénéficier des systèmes locaux (aides, pôles de compétitivité, région, etc) afin de se mettre en place ? Auriez-vous quelques pistes pour les personnes souhaitant également s’implanter sur place ?

Florian : Nous avons pu compter sur l’accueil chaleureux de Stephane Garcia et son équipe d’« Invest in Bordeaux » mais la crise sanitaire du Covid19 ne nous a pas permis d’exploiter l’essentiel de leur champ d’action.
Sinon, aucune aide si ce n’est celle d’amis. Je pense notamment à Cédric Babouche d’ « Un je ne sais quoi » avec qui on a partagé les locaux au départ.

3DVF: Florian, quelles différences vois-tu entre la création de Tsunami et celle de Supamonks ?

Florian : Supa a été conçu dans une jeunesse insouciante. Nous ignorions en arriver à ce succès, à cette qualité de créations et à cette envergure !
Il y a beaucoup à conserver de cette aventure.
Tsunami est un concept plus léger, plus sage et raisonné.
Aujourd’hui que je suis plus expérimenté, je fais le choix d’une stratégie de croissance maîtrisée sur ce qui me fait toujours autant vibrer : raconter des histoires en donnant vie et émotions aux personnages/éléments d’un film d’animation.
Je suis convaincu de son avenir dans une si belle région avec une telle équipe !

3DVF : Merci pour vos réponses, Tsunami ! Nous aurons évidemment l’occasion de reparler du studio lors de vos prochains projets.

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