3DVF : Continuons avec Versailles. Tu avais déjà travaillé sur la saison 1, et le client a manifestement été satisfait puisqu’Asile est revenu sur la saison 2 pour créer deux visuels vertigineux : deux acteurs suspendus dans les airs, avec un décor architectural très travaillé. Peux-tu nous en dire plus sur le concept visuel, et la manière dont avec le reste de l’équipe tu as concrétisé cette vision ?
Ivan Rose : Un client satisfait qui revient est naturellement la plus belle récompense à nos yeux, et ce fut le cas de Canal + à de nombreuse reprises.
Merci d’évoquer une des plus belles images à laquelle j’ai eu le plaisir de contribuer. Une passionnante aventure, une fois de plus, avec l’agence BETC.
L’idée de base était ces personnages sans gravité dans une tour typée Versailles, une tour sans fin, étourdissante.
À force de maquetter en temps réel avec l’équipe et l’agence, l’idée de désaxer les étages les uns par rapport aux autres est rapidement devenu une évidence, ce qui accentuait le côté vertigineux, ainsi que le mouvement général du visuel.
Après validation du concept, j’ai créé un étage assez « poussé », puis l’ai répété x fois en changeant l’axe.
Une fois le travail de lumière achevé, le shooting a pu avoir lieu. Les photos d’Eugenio Recuenco étaient magnifiques et le tout, encore une fois très bien intégré par l’équipe retouche, a donné naissance à l’image que tu connais.
3DVF : Les visuels mêlant photos réelles et décors virtuels sont délicats à mettre en oeuvre d’un point de vue lumière : éclairer décors et humains de façon cohérente n’est pas toujours possible, ni même souhaitable si on veut mettre ces derniers en avant… A l’inverse, un éclairage trop incohérent pourra créer un résultat peu esthétique.
D’une manière générale, comment abordes-tu ce genre de défi ? Et y a-t-il des échanges directs entre le studio et le photographe ?
Effectivement, on peut vite aller droit dans le mur si les bonnes étapes de prod ne sont pas respectées. Comme je vous le disais pour La guerre des mondes ou Versailles, l’étape d’une prémaquette 3D poussée est tout bonnement essentielle. C’est la seule façon de préparer au mieux ce genre d’exercice. On fait le décor dans un premier temps, plus ou moins avancé puis on place la lumière et des personnages fictifs dans la position souhaitée. C’est là qu’interviennent les échanges avec les agences et photographes. La 3D est un outil génial pour facilement tester, composer, essayer différentes lumières et angles de caméra dans des conditions » réelles ».
Après validation de la prémaquette 3D, le photographe repart avec toutes les bonnes informations. Si celles-ci sont respectées pendant le shooting, et ce n’est hélas pas toujours le cas, tout se passera pour le mieux jusqu’à la finalisation du projet. Comme aime à le répéter mon boss, Christophe : « Une belle image, c’est comme une bonne cuisine, on doit avoir les bons ingrédients au départ ».
3DVF : Un de tes outils principaux est le moteur de rendu Corona. Que penses-tu de cet outil et de ses évolutions récentes ?
Je suis resté des années sur V-Ray et Octane, mais j’avoue n’utiliser que Corona depuis quelques années. Il correspond en tout point à ma façon de créer et à mon workflow.
Il est simple côté render setting, très qualitatif, complet, et surtout le temps réel de ce moteur cpu est d’un confort sans précédent. Il est super stable, réactif et se met quasiment toujours à jour, peu importe les manipulations.
Je travaille la plupart du temps avec l’interactive render activé : c’est tellement agréable de bosser son image, sa lumière, un shader, un forest pack dans ces conditions fluides, avec un résultat quasi immédiat.
Ce temps réel et le light mix sont aussi un sérieux avantage quand je dois composer avec un client en direct.
Le random uv/color par mesh ou instance est juste trop pratique, le 2D pan zoom de max est compatible avec le temps réel (très cool pour le print), la compatibilité V-Ray est top pour bosser avec des freelances, le displacement 2.5 efficace et rapide, le scattering Corona est simple mais impeccable, les caustiques également, etc…
J’espère sincèrement qu’il continuera à évoluer dans le bon sens
3DVF : Tu es arrivé à la 3D de façon autodidacte. Avec le recul, que conseillerais-tu à des personnes qui hésitent à suivre la même voie ?
Je suis parfois terrorisé par l’avenir je vous l’avoue, ce n’est pas toujours facile de suivre l’évolution très rapide de ce milieu, d’être toujours à la page, surtout avec les années qui passent. Il m’arrive aussi de regretter de ne pas avoir choisi une voie qui rime davantage avec sécurité de l’emploi. Mais j’adore ce métier donc…
La chose primordiale c’est d’être passionné par ce que l’on fait je crois, c’est ce qui me fait avancer. J’ai toujours la même soif d’apprendre, de créer, la même excitation devant un nouvel outil qui m’ouvre d’autres portes, les possibilités de la 3D sont tellement infinies. j’aimerai avoir plusieurs vie pour tout expérimenter.
Au-delà de la technique, et ça peut sembler une évidence que j’assume, l’œil est également, à mon sens, une qualité sine qua non dans ce job. Trouver le bon équilibre dans une image ou une animation, la composition, lumière, rythme, etc…!
3DVF : Pour finir, pourrait-tu nous indiquer quelques artistes ou oeuvres qui t’ont inspiré récemment ?
Pour être honnête, je manque vraiment de curiosité et reste souvent dans ma bulle créative, sans influence particulière. J’imagine que c’est une faiblesse mais aussi une force. Il est rare que je scrute le web à la recherche d’autres artistes.
Evidemment, je pleure de joie à chaque Pixar, devant tant de génie en tout point. Le dernier, Soul, m’a tout simplement retourné. Ils mettent la barre tellement haute…
C’est le cas aussi de Unit, pour qui j’ai naturellement une admiration sans borne, ainsi que le travail d’Alex Roman qui a été une réelle source d’inspiration pour le studio Asile et moi.
Pareil pour Jean-Michel Bihorel qui nous rend visite de temps en temps, un mec aussi talentueux qu’adorable.
Si je devais citer quelques noms découverts récemment sur le web, je dirai le studio Illusion, le studio Atomic 14, James Gardner, Vittorio Bonapace et Ian Spriggs.
Et bien sûr, les deux œuvres les plus importantes de ma vie, qui m’inspirent chaque jour, sont Loane et Liam, mes 2 petits loulous de 7 et 3 ans!
Merci encore à l’équipe de 3DVF de m’avoir accordé cette interview. Je vous souhaite une bonne continuation à tous en cette période inquiétante et surréaliste. Prenez soins de vous et de vos proches!
Pour en savoir plus
- Ivan Rose dispose de portfolios sur Artstation, Behance ;
- Le site du studio Asile ;
- Asile est référencé dans notre liste/carte des studios.
1 commentaire
Excellent!
[SIZE=3]The Third & The Seventh: 11 ans déja!!! [/SIZE]:eek:
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