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Interview 3DVF : retour sur le court étudiant Artifice

Issu de la promotion New3dge 2019, le court-métrage Artifice met en scène deux enfants au coeur d’une imposante cité du Moyen-Orient. Mais les apparences sont parfois trompeuses…

Nous vous proposons de revenir sur les coulisses de ce projet récemment arrivé en ligne en compagnie de Judicaël CEVA, Adrien DOUAY, Coline DELLA SIEGA, Coraline HUN et Diana LAO.

3DVF : Comment est né le concept du court-métrage, et quelles ont été vos sources d’inspiration ?

L’équipe Artifice : Nous avons énormément discuté des goûts de chacun afin de trouver une idée qui parle à tout le monde. Nous nous sommes dès le début mis d’accord sur le fait que nous voulions que nos personnages soient des enfants. Puis nous avons au fur et à mesure construit et développé une base pour notre histoire et nous nous sommes décidé sur le nombre de personnages principaux. Nous avions un début et une fin plutôt solide et à partir de cela nous avons construit le milieu de l’histoire qui a, au final, pas mal changé quand nous nous sommes attaqué au storyboard. Nous voulions vraiment faire une histoire qui ait du sens pour nous mais qui, aussi, marque l’esprit du spectateur.

Nous avons été inspiré par des films comme Amer Béton, le Tombeau des Lucioles ou encore Fight Club pour sa fin impressionnante. Nous avons aussi été influencé par les œuvres du Concept Artist Stéphane Wootha Richard, surtout par sa gestion de la couleur dans ses illustrations. 

Concept arts : environnements

3DVF : La ville est un des éléments les plus frappants du court, avec plusieurs plans qui nous permettent de la survoler et de découvrir bâtiments, foule, végétation, rivière… Comment avez-vous abordé cette tâche imposante ? Quels ont été les principaux défis et quelles astuces techniques/artistiques avez-vous utilisées ?

Adrien: Nous nous sommes vite rendus compte que la partie environnement allait être une tâche compliquée si l’on n’organisait pas le processus dès le début. Le premier objectif a été de mettre en place un layout avec des blocs de bâtiments en basse résolution, les axes principaux, les fleuves et d’avoir un mouvement de caméra déjà bien défini.  Cela nous a permis de valider l’organisation globale de la ville ainsi que la composition des plans. Je voulais éviter d’avoir ce côté trop procédural, que certains scripts comme Greeble génèrent. Obtenir une ville que des enfant auraient pu s’imaginer était primordiale.

Pour réduire la tâche de travail, Diana et moi avons créé des quartiers en essayant d’avoir des formes et des silhouettes assez différentes les unes des autres mais qui pourraient se combiner facilement tout en gardant un même style d’architecture. Ces quartiers ont tous été créés à partir d’une quinzaine de bâtiments différents, combinés à des assets de marché, de végétation, de tissus ainsi que de personnages déjà animés provenant de Mixamo. Le tout devant être en topologies légères. 

Cela nous a permis d’avoir très rapidement une ville fonctionnelle lorsqu’on a remplacé les blocs du layout initial par par nos quartiers. Et bien sûr tous ces éléments ont été transformés en proxies avant l’importation ce qui a permis de réduire drastiquement le poids de la scène principale. Avec ce système, il était très facile de pouvoir mettre à jour certains éléments et de les remplacer directement dans les scènes.

Les montagnes, elles, ont été faites à la fois avec un mélange de displacement map et de Scan trouvé sur internet et ont été texturées avec un matériau de sol basique pour harmoniser le tout. 

Enfin, j’ai pu m’occuper de détailler les objets importants au cas par cas, rajouter des éléments comme des temples, des tours, rajouter des drapeaux animés qui traversent certaines rues de part en part. J’ai pu modéliser 3 bateaux aux formes différentes et en animer quelques-uns. Tous ces éléments là ont permis de rajouter un peu plus de vie à notre ville. 

Concept-arts : personnages

3DVF : Vous avez opté pour la motion capture pour animer vos personnages. Comment s’est déroulée cette étape, ainsi que le nettoyage des données ?

Coraline: Nous sommes allés tourner au studio de motion capture Mocaplab, au nord de Paris. Nous avions une première demi-journée pour découvrir la salle et préparer le terrain. Nous devions faire en sorte de nous organiser le mieux possible afin de pouvoir tourner l’intégralité de notre film en une seule journée. Nous sommes donc retournés au studio de mocap pour le tournage qui fut assez long mais très enrichissant. Comme je m’étais occupé du layout du film, je connaissais très bien nos scènes et, avec l’aide de Judicaël, nous avons pu diriger nos deux actrices tout le long du tournage.  

La principale difficulté que nous avons pu rencontrer fût de capturer les courses et les sauts étant donné que la zone de motion capture était assez petite pour ce genre d’actions. Les autres scènes, plus calmes, furent beaucoup plus amusantes à tourner.

Quant au nettoyage des données, Mocaplap a pris le soin de nous envoyer des fichiers déjà assez propre mais il a fallu, évidemment, quand même repasser dessus. Aussi, avec l’aide de Diana, j’ai dû faire beaucoup de blend d’animation pour les motions captures de courses et de sauts. Ce fût un travail plutôt fastidieux étant donné que Diana et moi n’avions jamais utilisé MotionBuilder auparavant.

extrait du storyboard

3DVF : Les simulations de vêtements peuvent s’avérer complexes lorsque l’on superpose plusieurs couches de tissus : comment avez-vous géré cette partie du court ?

Coline: La création et la simulation des vêtement se sont effectué sur Marvelous Designer. Dès le début, lorsque j’assemblais les morceaux de tissus ensemble, j’anticipais aussi la simulation. Comme je n’avais jamais utilisé Marvelous Designer auparavant, j’ai pris mon temps pour rendre les vêtements propres et logiques dans leur confection. De cette manière, j’ai pu aborder la simulation avec une base stable et fonctionnelle. Mes notions de couture m’ont beaucoup aidé pour cette phase.

Les tissus étant longs et en bonne quantité, il a fallu trouver un juste équilibre pour la densité topologique des proxies utilisés pour la simulation. Il fallait que les tissus puissent avoir une belle fluidité tout en ayant des temps de simulation raisonnables.

Ma base étant solide, je n’ai par la suite eu qu’à contraindre certaines parties des vêtements pour qu’ils ne bougent pas trop pendant les courses ou les mouvements amples. 

Par rapport à la simulation, le plan ou notre petit personnage roule à terre après sa chute fut le plus compliqué à gérer de par sa vitesse et le contact avec le sol.

De manière générale se sont surtout les contacts, entre personnages ou avec le décor, qui ont été plus délicats. Il y a eu beaucoup d’échanges entre Coraline et Diana, qui se sont occupées de nombreux shots en animation, et moi pour permettre des simulations sans problèmes d’intersections.

3DVF : Revenons sur le lighting. Comment avez-vous mis en place l’éclairage du marché couvert, qui comporte à la fois des zones d’ombre et des rayons de lumière ?

Coline: Pour la séquence du Marché nous nous sommes inspirés des marchés des pays du Maghreb. Nous voulions beaucoup de diversité dans les stands, un genre de chaos organisé, pour pouvoir jouer avec les silhouettes et reflets des différents éléments. Une fois les stands et leur placement effectués, je savais que ce qui devait transparaître était un sentiment de mystère, comme si le marché était resté figé dans le temps, sans pour autant le rendre inquiétant. Il me fallait donc beaucoup de flexibilité par rapport à l’éclairage, que je puisse éclairer ou mettre dans l’ombre le moindre détail, tout en ayant un toit qui puisse logiquement se prêter à ce genre de flexibilité. J’ai donc choisi de faire le toit avec des planches de bois ce qui me permettait de laisser filtrer la lumière là où sa présence se faisait intéressante. J’ai aussi rajouté des draps rouges accrochés au toit pour habiller l’environnement et me rajouter plus de chaleur dans les ombres. D’autres lumières ponctuelles ont été ajoutées pour détacher certains objets et avoir des reflets plus intéressants. 

Une fois les zones d’ombre et de lumière placées j’ai ajouté des fx de fumée pour accentuer le sentiment de mystère.

3DVF : Pouvez-vous aussi nous parler des différents effets, qu’il s’agisse de fumée, de feux d’artifice ou des glitches visuels ?

Coline:  J’ai créé quelques effets de fumée d’ambiance sur FumeFX qu’Adrien a placé dans presque tous les plans du film. L’histoire se déroulant dans une ville type du moyen orient, une atmosphère de sable et de chaleur était un point important, c’est un effet certes simple mais très important pour notre ambiance visuelle.

J’ai tenté de réaliser des effets de feux d’artifice, toujours sur FumeFX. Les résultats étaient très encourageants mais nous nous sommes vite aperçus que la création et le rendu de ces effets allaient être trop chronophages pour notre projet. Coraline nous a alors trouvé des stockshots d’une belle qualité que nous avons pu ajouter au moment du compositing.

J’ai pu réutiliser mes nouvelles compétences en feux d’artifice pour créer l’effet de projection de la grande créature que l’on trouve après le marché couvert.

D’autres effets de fumée ont été créés pour l’onde de choc de cette projection, ainsi que la fuite des créatures drapées qu’on aperçoit à la fin de la séquence du marché.

Les glitchs visuels ont été réalisés sur After Effects au moment du compositing en combinant différents effets de rendu peint, d’aberration chromatique et d’interférence vidéo.

3DVF : Un rapace est visible dans plusieurs plans. A-t-il été difficile de mettre en place son plumage et son animation ?

Coline: pour notre Milan Royal, nous nous sommes volontairement limités en termes d’animation pour simplifier notre approche quant à sa création et son animation. En partant du principe que nous allions simplement le faire battre des ailes et le faire planer, j’ai décidé de placer à la main seulement quelques rangées de plumes sur ses ailes et sa queue, le reste étant une disposition gérée avec Ornatrix. 

Ces quelques plumes posées à la main ont donc pu faire partie du rig que Judicaël a réalisé et m’ont permis de créer un cycle de battements d’ailes avec des plumes qui se plient: c’était notre principale exigence par rapport à nos possibilités d’animation. Je me suis attardée sur leur placement pour avoir le moins de difficultés possible une fois mon passage à l’animation, cependant je n’ai pas pu éviter une légère animation de position de celles-ci au cours de la création du cycle pour palier aux intersections.

Concept-arts : créatures

3DVF : Enfin, quelques mots sur le rendu/compositing ?

Adrien: En général, le rendu a été séparé pour chaque plan en trois parties: les environnements, les personnages et les FX. Cela nous a permis d’alléger les temps de calcul sur la farm de notre école et avoir un meilleur contrôle sur After Effects par la suite.  Pour les environnements, les personnages ont été masqués juste pour récupérer leurs ombres. On a utilisé des versions allégées des personnages pour éviter encore une fois d’alourdir les rendus. Pour un projet comme celui-ci, les renders passes ont été essentiels pour nous permettre de procéder à des corrections rapides en compositing. On a rendu chaque environnement avec une passe de réflection, réfraction, diffuse, beauty, depth, atmosphère, cryptomat et enfin la SunLight et la Gi. Sans oublier aussi les différentes Lumières qu’on a pu voir à la fin du court métrage durant la nuit ou alors dans le marché.

Les personnages, eux, on eu une passe de SSS ainsi que certaines passes de light select en plus pour rehausser certaines highlights des yeux notamment. Quant aux FXs, ils ont été rendus avec l’environnement et les personnages en Matte pour pouvoir les intégrer facilement par dessus le reste en post prod.

Toutes ces passes nous ont permis d’avoir un meilleur contrôle en compositing pour corriger certaines textures défaillantes, booster les réflection, lumières ou intégrer des stock shots grâce à la zdepth. Enfin un grade a été appliqué sur l’ensemble du film. Nous avons utilisé un Looks (Magic Bullet Looks) qui nous a permis d’harmoniser complètement les couleurs du  films, d’ajouter un grain, une légère distorsion, de l’aberration chromatique et un léger glow. 

3DVF : Comment avez-vous évolué depuis la sortie de l’école ? Certains membres de l’équipe sont-ils en recherche de poste ?

Coline travaille actuellement  en CFX à Axis Studios, et ce depuis Octobre 2019.
Coraline, elle, travaille en tant que Previs Artist aux Androïds Associés depuis Septembre 2019.
Judicaël est actuellement Character Artist à Unit Image. Il a aussi travaillé pour Nki et Capsule.
Adrien travaille à Axis Studios en tant qu’Environment Generalist 3D/DMP Artist depuis Octobre 2019. Il a également travaillé pour Nki avant de rentrer à Axis Studios.
Diana a travaillé à Capsule en fin d’année 2019.

3DVF : Merci à toute l’équipe pour vos réponses !

Pour en savoir plus

New3dge est référencé dans notre carte et liste des écoles.

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