Interview : Eric Tranchefeux – Illustrateur numérique et traditionnel


3DVF -T’es-tu déjà un peu essayé à la 3d et que penses-tu de cet outil ?

Eric Tranchefeux : Oui bien sûr que j’ai essayé la 3d, avec 3dsMax notamment. C’était en 2000, mais se former tout seul tout en gérant des clients n’est pas chose facile, surtout que mes prédispositions en dessin et peinture ne pouvaient guère m’aider, hormis sur du concept. C’était un peu redémarrer du début. J’ai donc préféré continuer sur la 2d, qui reste de toute façon mon outil de prédilection.

Ce qui ma réconcilié avec la 3d plus récemment c’est ZBrush. Avec lui, mes techniques de dessin et de peinture sont parfaitement adaptables. En partant d’une simple boule, on peut sculpter un personnage et le peindre directement sans trop de manipulations, à condition de connaître l’anatomie.  Ces outils sont évidemment fabuleux quand ils sont bien utilisés par les artistes qui les maîtrise, et à condition de garder à l’esprit qu’il s’agit d’émotions ; c’est ce qui compte avant tout, et non pas un amas de polygones qui n’exprime rien.

 

 

3DVF – A quel genre de projet aspires-tu aujourd’hui ?

 

Eric Tranchefeux : Actuellement, je voudrais me consacrer davantage à la peinture, c’est clairement ma plus grande passion.  L’enseignement me plait aussi beaucoup, car j’ai eu la chance de rencontrer les bonnes personnes. Je réfléchis aussi à un artbook sur mes peintures personnelles avec des tutoriels, et je prépare aussi des projets d’expositions. L’idée de monter un studio créatif ou de jeu vidéo ne me déplairait pas, et ce serait dans la lignée de mon parcours déjà accompli.



La Forge (numérique)


3DVF – Peux-tu nous en dire plus sur tes sources d’inspiration et les choses qui t’ont marqué récemment?

 

Eric Tranchefeux :  La dernière chose qui m’a vraiment  impressionné, c’est l’agneau mystique des frères “Van Ecky” que j’ai été admiré à l’église “Saint-Bavon de Gand” en Belgique il y a environ deux ans. L’œuvre est un polyptyque composé d’un total de 24 panneaux encadrés de 1432. J’avais vu beaucoup de reproduction, mais l’original est tout simplement fabuleux ; il m’a vraiment impressionné. J’ai dû rester environ 2 heures devant, à en disséquer les moindres détails. C’est ce genre d’œuvre qui me procure beaucoup d’émotion, de par sa virtuosité technique et la science artistiques ou symboliques qu’il faut parfois déchiffrer dans des livres tellement elle peut être complexe.


En parallèle pour ne pas paraître trop moyenâgeux, je regarde tout ce qui se fait et qui peut m’enrichir.



The Wall  (numérique)


3DVF – Pour terminer, que penses-tu de l’art numérique en général, de ses avantages et de ses faiblesses?

Eric Tranchefeux : J’ai l’impression que l’art numérique est plus une révolution technique qu’artistique, plus particulièrement au service des industries de l’image (jeux, film, illustrations, etc.). Il y a une multitude de choses très intéressantes et nouvelles qui se font grâce aux possibilités techniques libérées de toute frontière, mais qui répondent trop souvent aux codes bien établis de l’image commerciale, et ne s’inscrit que rarement dans le cadre d’un véritable mouvement artistique propre et nouveau lié au numérique.

Il y a aussi le support qui pose problème. Le fait de ne pas avoir d’original, sans même parler de la facture très différente entre une vraie peinture réalisée avec des pigments qui peut résister à plusieurs siècles et dont la couche transpire l’artiste qui la faites, et une peinture numérique, aussi sublime soit-elle, qui ne vie que par les techniques dont elle est constitué avec des  0 et de 1 (pas très sexy…).


Une impression, même de haute qualité, dispose d’une durée de vie de 100 ans, ou un peu plus. Le fait de pouvoir la reproduire à l’infinie diminue aussi grandement sa valeur et la réduit au final à un beau poster.

 

Je me demande souvent que deviendront toutes ces fabuleuses images que l’on voit défiler à longueur de temps sur nos écrans. Une fois qu’elles auront disparue de la toile, où pourra-t-on les admirer ? Sur un disque dur ? Un CD qui s’effacera au bout de 10 ans ? Quelque part dans un artbook ?


J’ai l’impression que l’art numérique est promis à une consommation boulimique et  éphémère, au renouvellement constant des artistes qui les fabriquent. Cela correspond à notre société actuelle du virtuel, et peut-être qui sait, à un nouveau mouvement artistique. L’avenir nous le dira…

 

3DVF : Merci Eric d’avoir pris le temps de partager avec les lecteurs de 3DVF ta passion et ton expérience !


Tribute to Rembrandt (numérique)

 

Pour en savoir plus sur les travaux d’Eric Tranchefeux, visitez ses sites :
www.tranchefeux-arts.com
( Edition & concept art ) et www.tranchefeux.com (généraliste)


Consultez également un making-of de l’illustration

‘La Jeune Fille à la Perle’ réalisée tout spécialement pour accompagner cette interview.



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