Compte-rendu : Laval Virtual 2012

Laval Virtual

Une expérience plus éloignée des frontières de l’éthique consistait à rechercher des moyens de combattre les symptômes de la maladie de Parkinson à l’aide d’une stimulation directe et profonde du cerveau, via des implants. La vidéo dévoilée a laissé le souffle coupé à l’assistance : un homme incapable de se déplacer seul et en proie à des mouvements incontrôlés permanents retrouvait le contrôle de ses membres, avec arrêt complet des tremblements et, au bout d’un certain temps, la possibilité de se déplacer de façon bien plus autonome.
Inconvénient de la méthode, les batteries s’usent (deux ans de longévité), et les patients sont réticents à l’idée de devoir se « recharger » régulièrement. Le but est donc désormais d’améliorer l’efficacité du système : plutôt que de stimuler en permanence le cerveau, il est possible de surveiller ce dernier via des capteurs, et une intelligence artificielle prédit l’apparition des problèmes. On peut ainsi envoyer une stimulation exactement au bon moment, et économiser la précieuse énergie électrique.

Après la robotique et le médical, c’est le volet de l’amélioration qui a été abordé. Pourquoi, demande Warwick, devrions-nous nous contenter de fusionner l’homme et la machine en cas de problème ? Pourquoi ne pas profiter des innovations pour enrichir nos capacités et nos sens ? Et le chercheur d’évoquer extensions corporelles, amélioration de la mémoire ou encore accélération de la pensée, voire communication entre humains par images à la place des mots.
Si le propos peut semble sortir d’un livre de science-fiction, la réalité s’en rapproche de plus en plus. Warwick a lui-même donné de sa personne, en se faisant implanter en 2002 une puce dans le système nerveux de l’avant-bras, près du poignet. Ce type de système permet ensuite de suivre de manière informatique les impulsions au niveau du système nerveux, et de contrôler à distance une main robotisée.

Plus tard, sa femme subit la même procédure, donnant lieu à des expérimentations sur la communication non verbale : une impulsion envoyée à la puce de Warwick lui permettait par exemple de ressentir une impulsion quand sa femme bougeait la main.

Pour plus d’informations : le site de Kevin Warwick, sa page Wikipedia. Ci-dessous, la vidéo de la conférence.

 

 

Université de Liège : la réalité virtuelle comme thérapie

Adina Cismaru Inescu présentait un essai clinique de thérapie à base de réalité virtuelle ayant pour but de traiter la dépendance sexuelle, mise en place par une équipe variée : psychologue, urologue ou encore gynécologue. Le but est de proposer une méthode de thérapie qui donne confiance au patient, pour qu’il se sente en sécurité ; la présence du médecin à ses côtés permet de conserver le contrôle. De plus, le système va donner au patient un sentiment de discrétion, diminuant sa gêne et facilitant la démarche.
Actuellement en cours d’évaluation, la méthode consisterait à combiner une thérapie cognitivo-comportementale (TCC) avec de la réalité virtuelle : 25 sessions de 15 minutes. Le matériel utilisé (casque de réalité virtuelle, joystick et PC) est peu onéreux.

Deux groupes de 25 personnes participent au test : un premier groupe suit cette nouvelle thérapie, le second se contentant uniquement de la TCC, qui constitue le traitement de référence actuel.

L’objectif, constater si la réalité virtuelle produit bien une baisse encore plus forte des pulsions et troubles chez les patients. Des résultats positifs ont été obtenus par d’autres équipes sur des troubles alimentaires, le traitement de la douleur ou encore les addictions à différentes substances.

 

Jeffrey Shaw

 

Ci-dessus, deux projets auxquels Jeffrey Shaw a participé : MovieMovie (les images sont projetées sur une structure gonflable, le public peut s’y déplacer) et Legible City (le vélo permet de se déplacer dans la ville virtuelle).

Le professeur Jeffrey Shaw nous a proposé une keynote sur le cinéma du futur, qui consistait surtout en un historique des travaux qu’il mène depuis les années 60 sur la création et l’immersion.

MovieMovie en 1967, qui permettait aux spectateurs de littéralement sauter « dans » l’écran, Legible City en 1989 avec un voyage dirigé par le spectateur dans une cité virtuelle dont les bâtiments sont des phrases, PLACE-Hampi en 2006 qui proposait de voyager dans des panoramiques cylindriques photographiés dans l’antique ville d’Hampi en Inde, avec parfois des animaux 3D incorporés aux scènes, Configuring the CAVE en 1996 qui permettait d’interagir dans un système de réalité virtuelle en modifiant la position et l’attitude d’un mannequin en bois…

Shaw explore depuis plusieurs décennies les interactions possibles entre spectateur et écran, produisant tout à tour des oeuvres qui étonnent, intriguent ou font divaguer l’imagination.
Nous vous invitons à faire un tour sur les deux pages sur lesquelles il évoque ses anciens projets et les plus récents : si vous aimez les installations artistiques et l’exploration quasi métaphysique des rôles du spectateur, du réalisateur et de l’écran, vous trouverez ici de quoi vous rassasier.

Ci-dessous, PLACE-Hampi et Configuring the CAVE.

 

Enseignement

Quelques écoles étaient présentes sur le salon, avec parfois des projets ou rencontres étonnantes :

– sur le stand de l’ESCIN (École supérieure de création interactive numérique, située à Laval), trois étudiantes et un cobaye présentaient une application développée en parallèle avec l’école de kinésithérapie de la ville. Mylène Guette, Élise Betton et Clotilde Moussier ont réalisé avec l’aide d’un ingénieur le système Anatomia, destiné à la formation des étudiants.

L’application projette sur le corps du cobaye un écorché humain, qui aidera les étudiants à mieux visualiser et apprendre les différents muscles ou os. Un système de tracking simple permet desupprimer l’affichage d’un muscle spécifique, découvrant ainsi la zone inférieure.
L’objectif est de transmettre le projet à la promotion suivante, qui pourra y ajouter des fonctionnalités : par exemple, une calibration automatique selon la morphologie et la position du cobaye.

ESCIN

Un peu plus loin, nous avons rencontré Marie-Pierre Besnard, responsable de la licence professionnelle D2PC (Développement et Protection du Patrimoine Culturel mention réalité virtuelle et formation multimédia) mise en place par l’IUT Cherbourg Manche. Atypique, la formation se destine à la fois aux étudiants, aux salariés et aux demandeurs d’emploi : une formation initiale et une formation continue sont proposées, de façon à s’adapter aux différents profils. C’est d’ailleurs le côté sur-mesure de la formation qui est à mettre en avant : formation initiale ou continue, projet tuteuré seul ou en groupe, cours d’adaptation pensé pour s’adapter au parcours très variés des candidats…

Le but de D2PC : se former à la valorisation du patrimoine par les nouvelles technologies, et notamment par la 3D et les visites virtuelles.  Après un semestre en centre de formation, les étudiants réalisent un projet en autonomie, avant d’enchaîner sur un stage de 14 semaines en entreprise.


L’implication avec des projets de recherche permet aux étudiants de s’impliquer sur des idées originales : par exemple, la reconstitution (scientifiquement exacte) du son de l’orgue d’une église, le résultat étant mis en avant via une borne interactive.

Autre exemple de projet sur lequel les étudiants pourraient travailler à l’issue de leur formation, Notre-Dame Retrouvée
Il s’agit d’une reconstitution de Notre-Dame de Saint-Lô (située dans la Manche), église qui s’était effondrée en 1944, sous les bombardements, durant la libération. Reconstruite, elle a donc beaucoup évolué par rapport à son aspect d’origine.

En quatre ans de travail, une équipe a pu créer un modèle virtuel scientifiquement exact de l’église avant la Seconde Guerre Mondiale : pas question ici de laisser libre cours à la créativité artistique, le but est d’avoir un résultat le plus proche possible de la réalité, en se basant sur des reconstitutions ou documents d’époque. L’usure du sol, la façon dont la lumière joue avec les vitraux ou encore le son de l’orgue ne doivent rien au hasard. Évidemment, cette approche demande une passion et une rigueur sans failles.

Le modèle sera à terme présenté dans l’église elle-même sur une borne interactive ; la version actuelle est accessible en ligne sur le site du projet (plugin 3DVIA requis).

Il est à noter que le projet a une vocation citoyenne, presque « politique » : de nombreux habitants voudraient reconstruire les flèches détruites de l’église, or il faudrait pour cela détruire les 60 ans d’histoire qui ont suivi la Seconde Guerre, qu’il s’agisse des vitraux ou de l’architecture… Le but de l’application sera donc aussi de faire prendre conscience aux habitants que même si l’église n’a plus son apparence initiale, vouloir à tout prix retrouver celle-ci est absurde sur le plan de la conservation du patrimoine.

Pour plus d’informations sur cette formation :
– Le site de l’IUT
– la plaquette 2012 (lien direct vers le pdf)

Notre Dame Retrouvée

Captures d’écran de la visite virtuelle de Notre-Dame de Saint-Lô, dans la Manche

 

Bilan du salon

L’édition 2012 de Laval Virtual aura été riche en découvertes. Le salon a trouvé son rythme de croisière, avec une taille stable par rapport à l’an dernier, et une organisation bien rodée dans l’ensemble. Pas grand-chose à redire, donc, si ce n’est la chaleur importante l’après-midi, sur laquelle les organisateurs n’ont évidemment pas un grand contrôle.
Relativement bien agencé, Laval Virtual a adopté une formule efficace, mêlant entreprises locales et lointaines, monde de l’entreprise et recherche : une approche qui n’est finalement pas si courante. Ce mélange des genres associé aux démonstrations en tout genre est à la fois éclectique et cohérent.
Nous espérons vous l’avoir démontré, l’évènement offre du contenu pour tous les goûts : des produits concrets et disponibles sur le marché à la réflexion philosophique durant les keynotes, en passant par les start-ups et les projets innovants.

Un évènement qui mérite donc d’être davantage connu… 3DVF compte d’ailleurs bien évidemment couvrir l’édition 2013 !

Pour en savoir plus

– Le site officiel de l’évènement.
– Le site Augmented-reality.fr a publié quelques articles se focalisant sur des stands, projets ou conférences particuliers.
Christophe Batier, Directeur Technique du service TICE de l’Université Lyon1, a mis en ligne toute une série de reportages vidéo sur le salon : interview, tour des stands, impressions… Près de 30 vidéos, qui valent le détour !

 

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