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Associations – Les Algoristes – Xavier Gouchet

Les Algoristes

Xavier Gouchet

 

Cette interview constitue le premier volet d’une série d’interviews autour des associations en lien avec la 3D et l’infographie en France.

 

Nous invitons d’ailleurs les associations intéressées à nous contacter (benoit -at- 3dvf.fr).

 

Nous avons choisi pour commencer de nous pencher sur « Les Algoristes », association regroupant des artistes utilisant des algorithmes développés par eux-mêmes pour créer leurs oeuvres.

 

Xavier Gouchet, secrétaire de l’association, ingénieur en 3D temps réel et actuellement enseignant et responsable au sein d’ISART Digital, a accepté de répondre à nos questions.


3DVF : Bonjour Xavier, pourrais-tu pour commencer nous parler des artistes algoristes ? D’où vient ce mouvement artistique ?

Xavier Gouchet : Bonjour Benoît. Je pourrais remonter aux années 1930, voire même dans l’antiquité tellement le principe fondateur des algoristes est ancien.

Le mouvement moderne, en tant que tel, commence réellement juste après le Siggraph 1995, où J-P. Hébert, K. Musgrave et R. Verotsko lancent le mouvement des Algorists.

Le but était de regrouper les artistes passionnés par cette technique de création, à base de règles.

Cyberflower - Verostko

Roman Verostko, Cyberflower Red, 2002.
Dessin algorithimque au stylo et à l’encre.

3DVF : Quels sont les artistes et œuvres les plus représentatifs de cette tendance ?

Xavier Gouchet : Je citerai principalement Roman Verostko, dont le travail a été récompensé par le Siggraph, et qui avec Jean-Pierre Hébert, Charles Csuri et Manfred Mohr, était l’un des précurseurs bien avant l’apparition du groupe. On peut aussi citer Ken Musgrave pour son travail sur les fractales.

Et même s’il n’est pas un algoriste « officiel », je considère comme tel Robert Hodgin, plus connu par son site Flight 404, et dont les travaux sont toujours époustouflants.


3DVF : Comment définir ce qui fait partie du mouvement ou pas ? Après tout, beaucoup d’artistes utilisent des algorithmes via leurs logiciels, que ce soit en infographie, cinéma, musique… Quelles sont les critères et limites pour qualifier une oeuvre comme faisant partie du courant algoriste ?

Xavier Gouchet : La principale différence est donné par la définition originelle des Algorists. Un Algoriste crée une oeuvre d’art à partir de ses propres algorithmes. Ce n’est pas tant l’utilisation que la création de l’algorithme qui est importante.

Lorsqu’un infographiste utilise un programme, la plupart du temps les algorithmes ne sont pas les siens propres (sauf plug-in perso).

Pour prendre un exemple typique, un générateur de fractales peut être utilisé par des infographistes, mais créer sa propre formule pour dessiner des fractales est typiquement Algoristique (si l’on me passe le néologisme).

 

3DVF : Y a-t-il un profil type de l’algoriste ? S’agit-il plutôt d’un mathématicien/informaticien qui s’est tourné vers les arts, d’infographistes s’intéressant aux possibilités des algorithmes, ou encore autre chose ?

Xavier Gouchet : Il n’y a pas vraiment de profil type d’Algoriste, l’association regroupant des profils très différents, avec même une historienne de l’art.

Mais effectivement on trouve beaucoup de dévelopeurs ayant une sensibilité artistique, essayant de trouver leur propre façon de s’exprimer, et des artistes cherchant de nouvelles techniques de création.

 

Robert Hodgin

Deux créations de Robert Hodgin : à gauche, Solar demo, 2008. A droite, Still from Radiohead contest video, 2008.

 

3DVF : Pourrais-tu nous raconter ce qui t’a amené à t’intéresser aux algoristes ?

Xavier Gouchet : Pour ma part, je n’ai jamais été très doué avec un pinceau ou une tablette graphique, les algorithmes me permettent de créer des images malgré tout. Lorsque j’ai intégré la formation ATI (de l’Université Paris 8)(ATI : Arts et Technologies de l’image, NDRL), j’ai découvert plein d’outils où je pouvais exprimer ma créativité au travers de lignes de code : Maya, Virtools, ou encore Processing.

3DVF : Tu fais partie de l’association « Les Algoristes », qui regroupe des artistes algoristes français. Quel est le but de l’association, quelles sont ses activités concrètes ?

Xavier Gouchet : L’association a pour objet la coopération entre Algoristes, que ce soit des travaux collaboratifs ou des échanges d’idées et de techniques. Concrètement, l’association se réunit environ une fois par mois, et chaque réunion fait l’objet soit de présentation des travaux d’un Algoriste en particulier, où à la création de projets communs.


Jean-Pierre Hébert

Oeuvres de Jean-Pierre Hébert : à droite, 11-4-11-47-10 blueKST, 2009. A gauche, graphite interference 6496, 2007.

 

3DVF : Combien de membres regroupe l’association ? Quelle est sa place et son importance sur la scène nationale et internationale ?

Xavier Gouchet : Nous avons aujourd’hui une quinzaine de membres réguliers, ainsi qu’une vingtaine de personnes suivant de près ou de loin l’activité de l’association. Nous sommes présents chaque année à Laval Virtual depuis 2007 (grâce à un partenariat avec le Paris ACM Siggraph et Laval Virtual), et nous avons également à un colloque sur les Esthétiques Spéculatives, à l’Ecole d’Art du Havre.

Sur la scène internationale, des réflexions lors d’une de nos réunions a conduit à un Poster présenté à Siggraph 2009, et nous travaillons actuellement à un projet commun pour Siggraph 2010.

 

Alain Blitter - Movement 54

Alain Blitter, Movement XXXXXIV, 2005.


3DVF : Quelles sont les conditions d’adhésion ? Quel sera l’intérêt pour un artiste Algoriste d’adhérer à l’association ?

Xavier Gouchet : Pour adhérer, il faut être un Algoriste soit même, ou faire preuve d’intérêt pour le domaine en général.

L’intérêt principal que j’y voit est l’échange, d’idées, d’informations, de projets, entre les membres de l’association, et la participation a des projets communs comme « la glu ».

3DVF : Peux-tu nous parler des projets « la glu » et Alkwarel, sur lesquels vous travaillez actuellement ?

Xavier Gouchet : Le projet Alkwarel a été mis en roue libre pour se consacrer essentiellement sur « la glu », dont l’objectif est sensiblement le même. L’idée est de permettre aux différents membres de mettre leurs créations en commun, avec le moins possible de contraintes de langage de programmation, de framework, de façon de coder, voire de façon de penser. L’outil nous a permis de soumettre notre candidature pour l’Art Gallery de SIGGRAPH 2010 et probablement une autre candidature pour le Computer Animation Festival.

Plus concrètement, Alkwarel est une boite à outil, permettant d’importer des images et d’y appliquer des filtres et effets créés par les Algoristes, une sorte de Gimp, mais où nous avons intégré de l’intelligence artificielle.

La Glu consiste en un système de script, qui ne fait qu’appeler des programmes externes, avec au besoin des paramètres d’entrées. Comme chaque Algoristes n’a pour contrainte que de créer un programme, la façon dont il le code est laissé à sa préférence. Cela nous a permis très simplement de créer des images en appelant au hasard tel ou tel filtre sur une série d’images.

 

Alkwarel

Images générées avec Alkwarel

 

3DVF : Quels sont les autres projets actuels et futurs de l’association ? A quelles manifestations et évènements l’association va-t-elle participer durant l’année 2010 ?

Xavier Gouchet : A court terme, nous allons essayer d’envoyer un film collaboratif à SIGGRAPH 2010, et comme les années précédentes, participer à Laval Virtual, en partenariat avec Laval Virtual et le Paris ACM Siggraph. A plus long terme, le bureau pourrait changer suite à notre AG en mars prochain, et donc peut-être de nouveaux projets verront peut-être le jour.

Personnellement j’ai quelques idées que j’aimerais mettre en place, mais j’attendrai d’en parler avec le reste de l’association.

3DVF : Aurais-tu des pistes et conseils à donner à ceux qui voudraient s’essayer à cette technique artistique ? Comment débuter, où trouver des informations sur l’actualité du mouvement ?

Xavier Gouchet : Je vais surtout parler de graphisme puisque c’est ce que je connais le mieux. Je conseillerais principalement le logiciel/langage Processing qui est idéal pour ce genre de chose et qui permet de faire de la 2D aussi bien que de la 3D.

Ensuite je dirais expérimenter au maximum. Il existe beaucoup d’algorithmes déjà existant et parfois en regardant le travail d’autres on trouve ses propres idées. Il y a aussi une bonne part d’observation. Parfois j’essaye de trouver des règles là où il n’y en a pas, dans le monde qui nous entoure, et un algorithme se forge alors de mon esprit. ensuite, il ne reste qu’à l’adapter à la création graphique.

 

Pour en savoir plus

Site officiel de l’association ;

Blog de l’association ;

Blog de Xavier Gouchet, qui traite régulièrement des algoristes et de processing ;

Site officiel de Processing, langage et environnement open source.

 

3DVF.com – Benoît Rogez

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