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Rencontre avec Philippe Faure

Philippe Faure
L’artiste Philippe Faure explore le secteur numérique depuis près de 10 ans. Une de ses particularités est son travail au contact du jeune public : lycées, collégiens et même maternelles.
Nous vous proposons de découvrir son univers et la façon dont il travaille avec la jeunesse ; l’occasion, peut-être, d’inciter certaines et certains d’entre vous à suivre également cette piste.

 

Philippe Faure

 

3DVF : Pour commencer, pouvez-vous nous dresser votre parcours en quelques lignes ?

Philippe Faure : Mon parcours professionnel est très protéiforme. J’ai étudié le dessin publicitaire, puis après avoir été accepté au Beaux-arts de Toulouse j’ai travaillé comme concepteur d’étiquette de vin (Bordeaux oblige !) où j’utilisais des iMac G3. A partir de là j’ai toujours recherché une autonomie artistique et exposé dans différents endroits : Musée des Beaux-Arts de Bordeaux, des galeries à Paris, Kassel… Ou des lieux atypiques telle la Base Sous-marine de Bordeaux.

3DVF : Vous êtes issu d’une formation d’art « classique » et non pas d’une école spécifiquement axée animation ou infographie. Comment en êtes-vous arrivé à utiliser le numérique dans vos projets ? Votre parcours vous donne-t-il une perspective différente d’artistes qui dès le départ se sont plongés dans ce domaine ?

Je viens de l’art vidéo et de la photographie numérique. J’ai toujours voulu faire évoluer mon médium artistique, et l’imagerie 3D était pour moi un bon support pour exprimer l’impact d’une pensée artistique. C’est en effet un medium du futur qui est en perpétuelle évolution.

Ma vidéo « Black Diamond», réaliséee en 2009 qui est un travail parlant d’asphyxie et de pétrole a pris aujourd’hui sa maturité et toute sa force dans notre actualité contemporaine. J’ai réalisé en 2008 ma première vidéo en imagerie 3D (« Jardin à la Française »), puis en 2009 une exposition entièrement dédiée à l’imagerie 3D intitulée « Dorures,moulures… ». Mon travail reste cependant déterminé par une pensée plastique et servi ainsi par le médium numérique : je veux signifier que la technique n’est pas ici la finalité et là est le bénéfice d’avoir été formé de façon classique en arts plastiques.
La 3D permet de fabriquer autremen
t la réalité : cela permet de contrôler les images jusqu’à l’excès et c’est cette outrance dans l’image qui est intéressante, tel un nouvel hyperréalisme en art. Cela interroge la notion de frontières entre réel et virtuel.

 

BLACK DIAMOND Sculpture binaire, identité digitale 3D, Philippe Faure from Philippe Faure on Vimeo.

JARDIN A LA FRANCAISE, 2008 from Philippe Faure on Vimeo.

Philippe Faure « Dorures, moulures… » animation digital 3D from Philippe Faure on Vimeo.

 

3DVF : Quelles sont vos thématiques de prédilection ?

J’ai toujours travaillé autour de « l’être fantasmé » (série sur les Avatars), soit au travers du monde des apparences (Soubrette abusives, Bourgeoise à satisfaire), du monde du luxe (Dorures, moulures...) ou comme de la technologie numérique que je partage et expérimente avec les jeunes générations. Je m’interroge beaucoup sur la nature humaine. Réfléchir sur le futur est aussi ma source de préoccupation et d’inspiration.
3DVF : Vous travaillez fréquemment avec un public scolaire. Si beaucoup des lectrices et lecteurs de 3DVF travaillent pour la jeunesse, ce lien direct est plus rare. Pourquoi cette démarche ?

Peut-être que leurs devenirs et leurs aptitudes sont une source d’inspiration. Je constate que la parole de ce public scolaire est souvent normée voire formatée. Il est intéressant de questionner les élèves et de les faire travailler sur des thèmes qui ne sont pas explorés en arts plastiques. Ils sont tout aussi créatifs qu’ils sont consommateurs, mais ils sont avant tout demandeurs d’expérimentations.

Pots
Artefacts et Hybridations
3DVF : « Artefacts et hybridations » et « Pot à semis 3D » [ci-dessus, NDLR] par exemple, mêlent nature et projets numériques : pouvez-vous nous présenter ces projets et la démarche sous-jacente ?

J’ai souhaité réaliser des ateliers qui redonne une certaine sensibilité créatrice tout en étant réceptif à nos connections avec l’environnement naturel. Ce sont deux expériences qui sensibilisent le jeune public aux techniques numériques en lien avec le respect de la nature.
Pour « Artefact et hybridation », nous avons travaillé sur le concept d’hybridation : nous nous sommes retrouvés avec des collégiens à l’entrée de la forêt des Landes afin de réfléchir ensemble et de créer une forme hybride qui puisse s’impliquer de manière pertinente dans un élément de la nature. Pour cela, les élèves ont fait des croquis, puis vient l’étape de dessin et de modelage 3D en salle informatique. Après une restitution des objets imprimés en 3D, nous sommes retournés en forêt afin de scénariser et photographier leurs réalisations.
Avec le projet « Pot à semis 3D » je considère aller vers le design social car cela est en rapports avec les territoires et les publics engagés, à avoir une population essentiellement rurale et des jeunes qui se destinent pour la plupart à des carrières agricoles ou redonner confiance a des préadolescents issus de pôles médico-sociaux. J’essaye aussi toujours de libérer au plus vite la technique afin de se consacrer au processus de création et de se centrer sur le thème.

3DVF : Quelques mots sur « Doudou, l’objet de mon affection » [ci-dessous], au croisement de l’enfance et de l’impression 3D ?

La technologie permet de faire se rencontrer des groupes de personnes qui apriori n’étaient pas destinés à se rencontrer autour d’un thème telle que la création de doudous imprimés en 3D. J’ai demandé à des lycéens d’aller poser une question à des élèves de maternelle : « a quoi ressemble ton doudou ? » A partir d’une restitution orale, les lycéens ont fait preuve d’imagination afin de restituer au mieux la parole de l’enfant.

Doudous

Mobile 360° from Philippe Faure on Vimeo.

Une publication partagée par Philippe Faure (@philippe_faure) le 14 Avril 2017 à 1 :44 PDT

3DVF : Quels logiciels 3D utilisez-vous pour ces projets, et pourquoi ? Certains outils vous semblent-ils plus adaptés que d’autres aux jeunes étudiants ?

J’aime bien travailler avec ce que j’appelle des «basiques efficaces» : sculptris, meshmixer, sculptGL ou 123design (même s’il n’existe plus) : des logiciels gratuits et rapidement accessibles pour l’utilisateur (sans inscription). Je suis très demandeur d’applications webGL car cela me permet de travailler de manière autonome dans différents lieux.

3DVF : Outre ces projets centrés sur la modélisation et l’impression, vous expérimentez également avec la vidéo 360° : « Bustes 360° », « Mobile 360° » [visibles ci-dessus, NDLR] en sont quelques exemples. Pouvez-vous nous parler de ces projets et de votre vision des contenus immersifs ?

Début 2016, j’ai travaillé la vidéo 360° avec deux cameras professionnelles de chez kodak et j’ai pu expérimenter la création de scénettes réalisées avec des étudiants forestiers devenus acteurs durant une semaine. Ces vidéos sont lisibles par casque VR cardboard ; je considère que c’est la suite logique et évolutive de la vidéo :  le spectateur se retrouve enfin immergé dans une œuvre d’art.
Il est évident que ce sont des nouveaux outils très précieux pour la création et je suis évidemment intéressé par l’évolution des casques de réalité virtuelle et de ses contenus créatifs.

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