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Retour sur le court-métrage Boko Anana

Boko Anana
 
Après avoir fait l’objet d’une campagne de financement participatif, le court-métrage Boko Anana est récemment sorti en ligne. Un projet original qui mêle humour et caricature.
Nous vous proposons aujourd’hui une interview des réalisateurs, qui reviennent sur la genèse du projet, les apports des studios Nki et Blacklab, le mélange de techniques 2D/3D ou encore la gestion de la campagne de financement.

 

Boko Anana from Boko Anana on Vimeo.

3DVF : Comment est né le projet Boko Anana ?

Jérémy Macedo, Franck Monier : L’idée de monter un projet commun est née en Juillet 2013 alors que nous travaillions ensemble comme animateurs au studio Chez Eddy. Notre projet était simple : faire un film suffisamment court pour rester réalisable, présenter un univers personnel et surtout une image et des animations de qualité.

Nous nous sommes alors demandé quel sujet aborder. La publicité s’est spontanément imposé tant pour le sujet que pour son format court et exigeant techniquement.
Nous voulions caricaturer le principe même de la publicité, une sorte d’envoûtement. Le thème du vaudou a rapidement suivi.
Petit à petit c’est devenu « Boko Anana ». Nous n’avions alors aucune idée de l’aventure qui nous attendait.

3DVF : Quelles ont été vos inspirations ?

Pour cette production, nos inspirations ont été très variées. Nous avons bien évidemment commencé par regarder de nombreuses publicités de céréales, de toutes époques confondues. Pour nous, le film devait être un peu exotique car nous traitions du vaudou, mais nous voulions un vaudou de dessin animé, fruité et coloré. Chacun a intégré ses envies et références : Jérémy a par exemple apporté son goût pour Harry Belafonte et le travail du chef op’ Benoît Debie. Franck a quant à lui laissé s’exprimer son envie de mélanger les techniques et son attirance pour l’esthétique et le design des 50’s/60’s.
Ensemble nous nous sommes aussi intéressés à la culture Tiki, au vaudou, aux fruits tropicaux, aux roller-coasters…. C’était fun. C’est le mix de nos univers respectifs et nos envies communes qui donne sa richesse au film.
Au niveau du « design » du film, nous avons simplement dessiné ce qui nous plaisait sans nous plier à un style graphique précis.

 

Boko Anana
3DVF : Quelle était la taille de l’équipe, et comment l’avez-vous mise en place ?

Une quinzaine personnes ont travaillé sur le film. Mais lorsque que nous ajoutons les personnes qui nous ont supporté lors de notre campagne de crowdfunding, celles qui nous ont aidé à organiser la première projection ou encore à imprimer le Art book, « Boko Anana » finit par rassembler plus d’une centaine de personnes.

Au debout nous n’étions que tous les deux. Nous avons créé le concept de la pub puis l’avons présenté au studio Nki qui a trouvé le projet intéressant et nous ont accueilli.
Hébergés par un studio, nous avons continué notre développement : écriture, concepts visuels, storyboard, color keys, design des personnages et de l’environnement…
Le projet est rapidement devenu plus ambitieux que prévu, et nous avons vite pris conscience que nous aurions bientôt besoin d’une équipe d’artistes.

Très tôt, nous avons compris que la musique devait avoir une place très importante. Plus nous avancions, plus nous voulions un film musical. Nous avons donc contacté plusieurs compositeurs, et Olivier Demontrond s’est imposé comme étant celui qui comprenait le mieux notre vision. Très talentueux et investi, il s’est énormément impliqué dans la création du film. En plus de la musique, il a aussi pris en charge tout le sound design et les enregistrements. Sa fille Daphné a même prêté sa voix à Colin, et il a convaincu Jérémy de faire celle de Boko.

Concernant la production visuelle, Anaële Vermot est arrivée en premier et s’est chargée de la modélisation de l’environnement. Elle a su lui donner vie et se plier à notre style graphique. Pour la modélisation du personnage, nous avons fait appel à Julien Nicolas qui nous a fait un petit Colin sur mesure. Pour articuler le personnage, on nous a recommandé Cyrill Calbac qui avait déjà travaillé avec une bonne partie de l’équipe du film. Ensuite sont venus nos trois supers animateurs 3D, tous très pros : Helder Pereira, Thomas Arnould (tous deux habitués du studio Nki) et Anthony Vincent, un jeune animateur très prometteur. Nous avons ensuite fait appel à Walter Mazoyer pour lui confier la séquence du « ride psychédélique ». Une fois que nous avions fini toute l’animation 3D, Romain Trimaille est venu faire du lighting et commencer le rendu, il a su transcrire le colorscript de Franck avec talent. Nous avons ensuite rencontré Guillaume Gaussuron qui a poursuivi le travail de Romain et pris en charge les plans « pack shot » et « vague de céréales », qui contenaient tous deux de la simulation. Guillaume a vraiment bien bossé, ces plans ont d’ailleurs été réalisés au studio BlackLab.
Une fois le film quasiment terminé, le compositeur nous a mis en relation avec Yan Volzy qui nous a fait l’étalonnage son et la sortie 5.1. Le film était enfin prêt pour la diffusion. Magique !

Boko Anana

3DVF : NKI Studio a assuré l’hébergement du projet et fourni l’équipement ; quelques mots sur ce soutien logistique ?

Le studio NKI avait déjà hébergé Jérémy pour la réalisation de son court-métrage Polypous, le toboggan tueur. Dès la présentation de notre projet, ils nous ont accueilli, fourni machines et logistique, et nous ont apporté tout au fil de la production leur aide et leur expertise professionnelle.
Sans cette aide précieuse et généreuse Boko Anana n’aurait pu voir le jour, et c’est aussi parce que nous nous sentions soutenu que nous avons pu oser nous lancer dans un film aussi complexe techniquement !
Nous aimerions profiter de cette interview pour remercier Alexandre Ada et Cédric Jeanne  pour cet accueil et leur soutien, mais aussi Mhamed Elmezoued qui a su nous proposer de nombreuses solutions techniques adaptées à nos contraintes.
Nous leur devons beaucoup !

3DVF : Quel était le rôle de Blacklab Studio ?

Le studio Blacklab, nous a été présenté par Guillaume Gaussuron à un moment critique de la production. En effet, nous arrivions à l’étape des rendus 3D et Nki était en pleine production, nous privant pour plusieurs mois de l’accès à la RenderFarm. Guillaume nous a donc suggéré de rencontrer le studio Blacklab. Ils ont été séduits par le projet, et en nous ouvrant leurs portes ils nous ont permis de finir le film sans attendre et sans rogner sur la qualité.

Un grand merci à Gabriel Kerlidou et Nessim Chebaane de Blacklab pour leur investissement et pour nous avoir permis de finir joliment le projet !

Boko Anana – Les différentes étapes de la 2D from Boko Anana on Vimeo.

3DVF : Comment s’est déroulée la production, en termes d’organisation ? Avez-vous travaillé sur votre temps libre, à plein temps ?

Au final, l’aventure se sera étalée sur près de deux ans.
En plus de la production du film au sens strict, nous avons aussi effectué tout le travail de chargé de prod : les recherches de financement, la campagne de crowdfounding ainsi que la réalisation de ses contreparties (notamment le ArtBook), la communication autour du film, la recherche de collaborateurs, et la gestion du projet.
Au cours de ces deux ans, nous avons aussi été très dépendants des disponibilités de tous les artistes qui ont contribué au film, mais aussi des studios qui nous hébergeaient.

Mais une fois la production lancée, elle ne s’est jamais vraiment arrêtée pour nous.


Que ce soit durant les pauses forcées par les plannings de chacun, où même pendant les périodes où nous devions tous deux aller travailler pour remplir les caisses, Boko Anana est toujours resté l’objectif numéro 1.Quel était votre pipeline logiciel ?
Les logiciels nous avons utilisé : Photoshop, Tvpaint, After effect, 3dsMax, Zbrush, Hairfarm, RealFlow… Mais en prod nous avons aussi utilisés Indesign, Excel, Word… Et surtout la calculette de Windows.

Boko Anana – Les différentes étapes de la 3D from Boko Anana on Vimeo.

 

3DVF : Le projet mêle différentes techniques : animation 3D, animation 2D, … Etait-ce un parti pris dès le départ ? Pourquoi ce choix ?

Au commencement, lorsque l’idée de la fausse pub est arrivée, nous avons naturellement  imaginé un mélange 2D/ prise de vues réelles. Cette esthétique, à la Roger Rabbit nous plaît. Mais en pratique, vu notre budget et notre manque de contacts dans le secteur du live, cela semblait trop risqué, pour l’ambition que nous avions.
La 3D était pour nous la solution idéale. Premièrement le studio Nki qui nous hébergeait maîtrisait totalement la technique et nous proposait de mettre ses outils à notre disposition, mais surtout cette technique nous permettait de conserver une différenciation visuelle entre l’univers 3D du petit garçon et l’univers 2D du sorcier Boko .
La 3D nous a aussi permis d’avoir un contrôle total sur l’environnement et le petit garçon. Bien évidemment au niveau du design, mais la 3D nous a aussi permis une totale liberté sur les cadrages, l’acting du petit garçon et évidement les lumières. Et nous en avons bien profité !

3DVF : Ce type d’approche mixte peut rendre plus complexe la production : avez-vous rencontré des difficultés à ce niveau, qu’il s’agisse de la cohérence visuelle ou de l’organisation ?

Il est vrai que mélanger 2D et 3D est difficile. Mais ce mélange permettait de bien distinguer les univers distincts des deux personnages. La cohérence graphique était assurée car nous avions tout dessiné en amont. Par exemple, bien que nous nous soyons répartis les designs, nous échangions continuellement pour garder une cohérence dans le film. La difficulté était pour nous plus technique qu’artistique.


Venant tous deux de la 2D, nous manquions parfois de connaissance concernant la 3D et ses contraintes, mais heureusement nous étions bien entourés et avons ainsi beaucoup appris.Le plus gros problème avec ce mélange de techniques vient des contraintes de production liées à celles-ci.
L’animation 2D est assez immédiate, la préprod est relativement courte : une passe de design, un petit model pack et hop c’est parti. La prod est par contre beaucoup plus longue. L’animation 2D demande du temps, car il faut littéralement dessiner le mouvement image par image.À l’inverse l’animation 3D est quelque chose de beaucoup plus long à démarrer.
Une fois le design validé, il faut passer par les étapes de modé/shading puis de rigging avant de pouvoir attaquer l’animation. Mais l’étape d’animation en elle-même est quelque chose d’assez court en 3D. On peut voir sortir des plans d’anim en quelques heures seulement, c’est assez cool !
En mélangeant ces deux techniques, nous avons cumulés les inconvénients, à savoir une préprod 3D et une prod 2D longues. Ceci d’autant plus que nous voulions caler la 2D sur la 3D, et il a donc fallu attendre que l’animation 3D soit terminée pour pouvoir lancer la prod 2D.Mais nous avons surtout bénéficié des avantages des 2 techniques :
La 3D permet de multiplier les détails et donne une touche réelle au monde du petit garçon ; et la 2D permet de par sa flexibilité d’apporter naturellement de la fantaisie.
C’est un mixte sous estimé et nous sommes très contents du résultat.

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