Dan Cox : Ce que la décoration d’intérieur moderne nous apprend sur l’Environment Art

Dan Cox

– Rythme : Dan Cox a donné ici des exemples montrant comment il est possible de guider le regard en jouant sur l’organisation verticale d’une pièce. Par exemple, en utilisant deux couleurs dominantes différentes en bas et en haut d’une pièce, ou en jouant sur les formes (bureaux avec chaises et écrans anguleux en bas, structure plus aérienne au plafond).

A l’inverse, dans une pièce qui manque de rythme (cuisine avec des placards identiques au-dessus et en-dessous d’un plan de travail), l’œil ne sait plus où aller, le regard se perd et les points d’intérêt sont moins visibles.

Rythme
Ci-dessus : deux bonnes utilisation du rythme, et une mauvaise (en bas).

 


– Proportion et échelle : il est possible d’influencer la perception du volume d’une pièce avec les objets qui sont situés dans celle-ci. Bloquer la vue avec des éléments donne le sentiment d’un lieu plus petit.


En décoration d’intérieur, on pourra donc « agrandir » une pièce en utilisant des éléments qui ne bloquent pas le regard (chaises aux pieds fins, table transparente, etc). Inversement, une pièce qui semble vide pourra être habillée en augmentant la taille des meubles, en utilisant des meubles qui coupent le regard et en ajoutant des éléments (comme de simples rideaux pour réduire la taille d’une fenêtre).
Echelle
A gauche, une pièce grande, qui donne le sentiment d’un espace presque vide. A droite, la même pièce réaménagée.

Trucs et astuces

Dan Cox a ensuite présente quelques trucs et astuces à l’aide d’exemples concrets.
– Ne pas lutter contre l’architecture : comme dans le design d’intérieur, un environment artist se retrouve régulièrement face à une pièce de taille prédéfinie, qui ne correspond pas à ce qu’il souhaiterait créer.

Plutôt que de vouloir à tout prix la modifier (changer la hauteur de plafond, par exemple), les règles vues plus haut et quelques astuces permettent de tirer parti de ce dont on dispose. Par exemple, une pièce trop haute pourra être décorée (moulures, tableaux…) de façon à abaisser naturellement le regard et donc éviter le sentiment d’un grand vide.

Fight

– La règle des 60-30-10 : choisir une couleur dominante qui occupera 60% de l’espace (murs, sols, majorité du mobilier), une couleur intermédiaire qui en occupera 30% (plafond, sols, petits meubles, placards…), une couleur d’accentuation qui comblera les 10% restants (moulures, tapis, oreillers, accessoires…).

Il ne s’agit évidemment pas d’une règle absolue mais de proportions qui « marchent » relativement bien dans la plupart des cas.

60 30 10

Pour finir, Dan Cox a appliqué tous ces principes à des captures d’écran de jeux vidéo. Une pièce dans Dishonored, tout d’abord, modifiée et redécorée. Le second exemple, tiré de la licence Splinter Cell, était sans doute le plus parlant. Cox s’est focalisé un grand classique du jeu vidéo : un espace industriel de type usine, rempli de tuyaux, murs et escaliers. 

Le joueur peut avoir du mal à savoir où aller devant l’excès de détails : fausses portes, murs complexes qui attirent l’œil, passages multiples, tuyaux sur lequel on peut grimper vs ceux avec lesquels on ne peut interagir, etc.

Cox a proposé ici une simplification de certains éléments pour indiquer clairement les interactions possibles, une mise en avant de chemins à l’aide de couleurs, une modification de l’éclairage pour atténuer la visibilité ce certains éléments (sol, par exemple) et mieux guider le joueur. En diminuant la complexité, on diminue l’emphase sur certains éléments.

On notera au passage qu’il est assez simple de faire des itérations avec la méthode utilisée par Dan Cox : plutôt que de modifier le niveau 3D, une simple capture d’écran et du paint-over dans Photoshop suffisent. Simple, rapide et efficace. La 3D s’avèrera toutefois nécessaire dans certains cas.

Ci-dessous : capture d’écran avant et après modification

Splinter Cell

Bilan

La présentation de Dan Cox ouvre une porte intéressante pour la création d’environnements de jeux vidéo. Elle incite à s’inspirer davantage du monde réel et moins d’autres jeux existants : de quoi éliminer efficacement les clichés vus et revus.

S’intéresser à la décoration d’intérieur sera en prime un atout pour de nombreux environment artists qui ont débuté en créant des props, et n’ont donc pas de formation spécifique sur l’aménagement cohérent et esthétique d’une pièce complète.

Attention toutefois à garder en tête les objectifs, qui sont différents : un décorateur d’intérieur, lorsqu’il crée une cuisine, crée… Un espace destiné à cuisiner. Ce n’est pas forcément le cas de l’environment artist, pour qui la cuisine aura per exemple vocation à être le lieu d’un combat. Ces objectifs différents, ces fonctions différentes influeront sur la conception.

Dan Cox a souligné que sa présentation s’applique aussi (dans une certaine mesure) aux espaces naturels tels que les grottes.

Pour aller plus loin, Dan Cox conseille d’éviter de s’inspirer d’autres jeux (univers déjà exagérés, qui comportent souvent des clichés) ou des films (la composition est pensée pour un regard contraint, pour la 2D, pas pour l’univers 3D d’un jeu).

Au contraire, se tourner vers les blogs ou chaînes spécialisés dans la décoration d’intérieur apportera de nombreuses informations et évitera de retomber dans les clichés. L’idéal sera de s’inspirer d’exemples pour lesquels on dispose de nombreux points de vue, pour avoir une bonne idée de l’espace de la pièce.

 

Pour plus d’informations

– La présentation complète de Dan Cox (disponible en audio et vidéo via un abonnement payant aux archives de la GDC), son compte Twitter ;

– Dan Cox conseille la chaîne canadienne HGTV, spécialisée sur le sujet. En particulier, les émissions Sarah 101 et Pure Design. Les épisodes sont disponibles en ligne, mais seul Pure Design est visible depuis la France.

– Dan Cox a également suggéré quelques blogs et sites : Freshhome, Decor8, Home Design Find, Apartment Therapy.

– Le site de Game Connection.

 

Chargement....

A Lire également