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SATIS et Screen4All 2017 : le point sur les outils de montage vidéo

Montage vidéo

L’édition 2017 du SATIS / Screen4All a été l’occasion de faire un bilan du marché actuel des outils de montage vidéo, avec une table ronde en compagnie de plusieurs spécialistes du domaine :

– Erwan Le Cloirec, consultant Blackmagic Design / rédacteur en chef YakYakYak.fr ;
– Frédéric Rolland, Senior Strategic Relations Manager, Digital Media Enterprise chez Adobe ;
– Jean-Philippe Aguer, Chef monteur truquiste / Réalisateur / Etalonneur / Formateur Avid Technology.
Le tout était modéré par Loïc Gagnant.

Les trois intervenants étaient donc directement liés aux éditeurs : on aurait donc pu s’attendre à des échanges consensuels et très plats. Cela n’a heureusement pas été le cas, grâce en particulier à quelques piques amicales lancées entre concurrents.

SATIS
Erwan Le Cloirec

Années 80 : le montage moderne apparaît

Nous avons tout d’abord eu droit à un historique ; Jean-Philippe Aguer a rappelé le rôle crucial de George Lucas, qui a eu dès les années 80 l’intuition des possibilités offertes par le montage numérique. Grâce à lui, les premiers systèmes informatiques de montage non linéaire voient le jour entre 83 et 86.
Dès 1984 Avid introduit l’usage de disques durs dans ses systèmes. C’est aussi à cette époque que naîtront la plupart des concepts modernes du montage, comme le chutier. Par la suite, Lucas revendra ses brevets à Avid, et prendra des parts dans la société.

Frédéric Rolland a de son côté évoqué de Première, After Effects et Audition. 25 ans d’existence, avec une réécriture du coeur de Première il y a 10 ans pour lui redonner un coup de jeune.

Enfin, Erwan Le Cloirec est revenu la création de la société Da Vinci au milieu des années 80, puis le lancement de Resolve en 2004. En 2008, l’outil saute le pas de l’accélération GPU. Enfin, en 2009, Blackmagic Design rachète DaVinci et devient l’éditeur de Resolve, aujourd’hui proposé en version 14.

Cibles et interfaces

Les trois intervenants ont ensuite défini la cible de leurs outils respectifs.
Pour Adobe, Premiere Pro vise avant tout la post-production et le cinéma, « pour pouvoir prendre le marché d’Avid », a précisé avec malice Frédéric Rolland.
L’outil vise également d’autres secteurs comme la publicité ou les amateurs éclairés : le choix d’un unique produit pour toutes les cibles est évidemment délicat à mettre en oeuvre. Frédéric Rolland a souligné qu’en parallèle, Adobe tente des expérimentations séparées pour tester interfaces et outils : une façon de valider des concepts sans pour autant renverser du jour au lendemain les fondements de son produit historique.

Du côté d’Avid, on voit Media Composer comme faisant partie d’une plateforme, un tout dont l’avenir sera sans doute le cloud.

SATIS
Jean-Philippe Aguer

Pour Resolve, Erwan Le Cloirec a rappelé que si l’outil a d’abord été développé en tant que solution d’étalonnage, il est lui aussi devenu une plateforme généraliste. Pas de public cible ici, tous les utilisateurs sont visés, y compris le grand public via la version gratuite.
Toujours selon Erwan Le Cloirec, une des forces de Resolve en termes de ciblage est l’interface, « la plus simple » du marché : une division en sections permet de séparer clairement montage, étalonnage, son, etc. Il voit donc Resolve comme un outil dans lequel un projet unique circulera de section en section entre les différents intervenants d’un projet, sans avoir à être exporté dans des outils tiers (contrairement à l’approche d’Adobe et de sa suite logicielle).

Jean-Philippe Aguer a admis de son côté que l’interface d’Avid est « parfois considérée comme monolithique », mais a mis en avant son côté fonctionnel et surtout les capacités de personnalisation, les raccourcis clavier.

Les raccourcis, Premiere en dispose bien entendu aussi. Adobe a choisi de ne pas réinventer la roue et de proposer aux utilisateurs de pouvoir utiliser les mêmes raccourcis que sur des outils concurrents : il s’agit évidemment de faciliter la transition depuis d’autres solutions.
La tactique semble fonctionner : Adobe revendique 1,5 millions d’utilisateurs de Premiere Pro.

SATIS
Frederic Rolland

Pas d’évolution majeure depuis 25 ans ?

D’autres thématiques ont été abordées, comme la question des codecs et proxies, problématiques indispensables avec la hausse de la définition des contenus à traiter.

La collaboration est un autre enjeu majeur, qu’il s’agisse de « collaborer seul » (via le cloud, en passant d’une machine à l’autre), d’échanger des données avec d’autres personnes ayant la même spécialisation ou entre différents métiers. Frédéric Rolland d’Adobe n’a pas manqué de rappeler les nouveaux Team Projects de Premiere Pro et d’insister sur le Cloud… Avant que Jean-Philippe Aguer ne se permette une petite pique sur Adobe Acrobat Reader DC, et sur le fait qu’Avid n’oblige pas les utilisateurs à s’abonner, « contrairement à d’autres ».

Cette question du positionnement tarifaire a d’ailleurs été abordée de front par Frédéric Rolland. Pour lui, si Adobe ne propose aucune version gratuite alors que ses concurrents le font, c’est avant tout une question de marché. Adobe vit uniquement du logiciel, alors que ses concurrents proposent aussi du matériel, qui finance le développement des outils.

Erwan Le Cloirec a invité les monteurs à ne pas s’arrêter à un seul logiciel, à ne pas hésiter à aller voir la concurrence. Une position qui va dans le sens de Jean-Philippe Aguer : pour lui, les outils du marché n’ont plus de « killer feature », de fonctionnalité qui les démarquerait réellement les uns des autres. Il n’y a « pas eu de révolution depuis 25 ans » dans le domaine du montage. Le choix de l’outil ne se fait donc plus sur les capacités pures, mais plutôt sur d’autres aspects : interface, intégration, plateforme, collaboration.

Une conclusion sans doute lucide mais que l’on peut trouver décevante. Face à des spécialistes qui admettent que les fondamentaux des outils de montage n’ont pas subi de transformation majeure depuis plus de deux décennies, certains pourront se demander si l’on n’assite pas, finalement, à une certaine stagnation.
A moins que ceci ne soit plutôt le signe que les outils ont atteint leur maturité… Nous vous laisserons en juger dans les commentaires.

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