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PIDS 2018 – Thor : Ragnarok, un défi pour Framestore (MAJ : making-of vidéo)

PIDS 2018
Crédits des images du film : Marvel/Framestore

Mise à jour du 8 mars : Framestore vient de publier sur Youtube le VFX Breakdown qui nous avait été montré lors de la conférence. La vidéo a été ajoutée dans l’article.
Publication initiale le 1er février 2018.

A l’occasion du Paris Images Digital Summit 2018, le studio Framestore a évoqué son travail sur le film Thor : Ragnarok, des studios Marvel. Un défi artistique et technique relevé sous haute pression, comme nous allons le voir.

Le superviseur VFX Alexis Wajsbrot a tout d’abord planté le décor avec quelques chiffres : 459 plans truqués, environ 360 jours de production, 38052 heures-personnes au total et l’équivalent de 3921 ans de calcul pour 1 CPU (bien entendu, Framestore est équipé : la ferme de rendu du studio comporte environ 15 000 processeurs).
Un travail colossal, donc, confié à une équipe comportant jusqu’à 309 personnes au plus fort du processus de création des effets visuels.

Alexis Wajsbrot
Alexis Wajsbrot lors du PIDS 2018

Les studios Marvel sont un client difficile, connu pour aimer les modifications et itérations : un des plans du film a d’ailleurs nécessité 954 essais avant d’être enfin approuvé. Au total, 104 220 versions des plans gérés par Framestore sont passées par le processus de revue, avec plus de 120 000 notes dans Shotgun, l’outil de passage en revue utilisé par le studio.

Cette masse de travail a nécessité un sprint final particulièrement ardu : Alexis Wasjbrot a indiqué que 195 plans ont été livrés durant la dernière semaine de travail, dont 43 le dernier jour. Le tout à 2 ou 3 semaines de la sortie du film !

La tâche de Framestore était concentrée sur l’Acte 3 du film, avec plusieurs éléments importants à gérer.

– L’arrivée sur Asgard, tout d’abord, avec le fameux pont (Bifröst). Même si la ville est déjà visible dans les volets précédents, elle a de nouveau été modélisée, avec environ 9000 bâtiments. Le relief dans lequel est ancrée la cité est fortement inspiré d’une ville située en Norvège.
Une fois le décor mis en place, toute la difficulté a été de trouver le bon éclairage pour le mettre en valeur. Après plusieurs tentatives, c’est finalement une ambiance de fin de journée qui a été adoptée.

– Le pont a posé plusieurs problèmes. Il faut savoir que Marvel a tourné les différentes séquences avec une foule de 200 à 300 extras dans un décor qui n’était pas censé être Bifröst, mais un autre pont bâti en pierres. Le studio a changé d’avis après coup, réalisant qu’en dehors des personnes passionnées par le comics, personne ne comprendrait d’où sortait ce nouveau pont.
Résultat : Framestore a eu pour mission d’adapter les prises de vue pour y remettre Bifröst. Une tâche qui a nécessité un gros travail de rotoscopie, mais aussi la création des reflets des acteurs sur le pont. Framestore a bien tenté de proposer un concept de pont moins réfléchissant, mais Marvel n’en a finalement pas voulu et a voulu conserver un rendu relativement proche des films précédents. Il reste toutefois quelques traces de cette vision alternative dans la bande-annonce : les reflets y sont plus discrets que dans le film projeté en salles.

Alexis Wajsbrot nous a également expliqué, qu’il a été délicat de positionner les différents plans situés sur le pont. Avec une foule trop près de la cité, les spectateurs n’auraient pas compris pourquoi les figurants ne se jetaient pas à l’eau pour échapper au danger ; trop loin, l’arrière-plan aurait été un océan banal et sans intérêt.
Pour le processus d’approbation, Framestore a utilisé une astuce : une petite carte avec le pont complet et la ville étaient incrustés dans le coin des plans à valider, avec la localisation précise du plan en cours. Un bon moyen de disposer d’une vue d’ensemble.

Hulk

– Hulk fut un autre élément central du projet. Pour Framestore, il s’agissait de faire au moins aussi bien qu’ILM, qui avait toujours géré le personnage jusqu’ici. Le studio a pu récupérer le modèle employé mais du fait des différences de pipeline, les équipes ont été obligées de repartir à zéro pour le rig et de refaire des displacement maps pour les shaders.
Détail intéressant : les muscles n’ont pas été gérés que par l’équipe Creature FX, comme c’est souvent le cas. Les animateurs disposaient eux aussi de centrains contrôles, de façon à pouvoir accentuer l’expressivité de Hulk.

Fenris

– Une séquence du troisième acte oppose Hulk à Fenris, sorte de loup géant qui accompagne l’antagoniste principale du film. 12 millions de poils ont été nécessaires pour lui donner vie.
Là encore, l’aspect artistique a été prépondérant ; au départ, Fenris était une sorte de husky géant, mais après quelques projections test, Marvel a voulu se rapprocher d’un animal moins familier : manifestement, tuer un chien passe mal auprès du public. De (très, très) nombreux tests ont suivi, Fenris se muant en une sorte de loup-garou, en créature à l’apparence hideuse, puis à nouveau en husky… 4 à 5 mois ont été nécessaires pour enfin parvenir au design final. Bien entendu, pendant ce temps, les artistes continuaient à travailler sur les séquences : pas le temps d’attendre. Il fallait donc prendre en compte les modifications régulièrement.
A noter : sur demande de Marvel, Fenris est en fait une louve et non un loup. Le but : éviter la présence d’un élément anatomique entre les jambes de l’animal. Il aurait été d’autant plus visible que la caméra définie avec le réalisateur Taika Waititi est en contre-plongée pour augmenter l’impression de gigantisme.

A la fin de la séquence opposant Hulk à Fenris, les personnages se battent dans la mer qui entoure le pont. Un cas inédit pour Framestore, les équipes n’ayant pas l’habitude de travailler les fluides sur ce type de gros plan. Il a fallu retravailler fLush, le solveur de fluides propriétaire du studio.

double

– Le personnage de Hela n’a pas posé de difficulté majeure : Marvel n’ayant pas su valider son design définitif avant le tournage, l’actrice a joué ses séquences en costume de motion capture. Il a toutefois fallu construire une doublure numérique haute résolution pour certains plans, visage inclus.
Les effets liés à Thor ont été plus délicats, en particulier dans sa version « Uber Thor », lorsqu’il se couvre d’éclairs. L’acteur a été filmé dans son costume de Thor, mais Chris Hemsworth ne projette évidemment pas d’éclairs dans la réalité : tout l’éclairage était donc à revoir. Même si le but était au départ de conserver au maximum le visage de l’acteur, il a souvent été plus simple de remplacer totalement Chris Hemsworth par sa doublure numérique, avec comme pour Hela un niveau de détail très élevé. Les images du tournage physique n’ont pas pour autant été perdues : elles furent particulièrement utiles en tant que références, par exemple pour les muscles.
A noter : comme pour le pont, la bande-annonce diffère du film final. On y voit une version réelle du visage de l’acteur, avec maquillage pour lui donner un simple cocard : Marvel ne voulait pas révéler avant la sortie que Thor allait perdre son oeil.

Thor Ragnarok

Thor Ragnarok

– Enfin, le personnage de Korg fut particulièrement long à être approuvé, avec de nombreuses itérations à cause de son visage de pierre. L’asset a fait de nombreux allers et retours entre les départements modélisation, rigging et animation afin d’obtenir un résultat qui soit expressif, dans lequel les roches du visage ne se déforment pas de façon excessive et n’entrent pas en collision. Des petites pierres ont été utilisées autour des yeux et de la bouche pour permettre des expressions subtiles.
Alexis Wajsbrot nous a précisé que le personnage final n’a pas été approuvé via une turntable classique, mais grâce à un plan en action, animé : un cas de plus en plus fréquent.

Dans cette conférence, Alexis Wajsbrot nous a dressé le portrait d’un projet complexe, en particulier à cause des méthodes de travail de Marvel. La nécessité de pouvoir modifier les assets et revenir à de nombreuses reprises sur certains choix imposent une grande souplesse aux studios d’effets visuels.

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